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Les astrocytes, future arme contre l’amblyopie ?

L’amblyopie est surnommée « l’œil paresseux » car le cerveau se concentre sur un seul œil et « oublie » l’autre. S’il n’est pas traité à temps, ce trouble peut faire des ravages sur les yeux de nos enfants. Bonne nouvelle : de récentes découvertes sur les astrocytes pourraient peut-être permettre, à terme, de trouver un traitement pour « remonter le temps »…

Enfant qui réalise un examen visuel chez l'ophtalmologiste

©standret

Amblyopie. Mot en 9 lettres qui peut être tenu responsable de la perte de la vision chez les enfants. Un rapport de la Société française d’ophtalmologie (SFO) définit l’amblyopie comme « une diminution plus ou moins sévère de la fonction visuelle du fait d’une altération précoce de l’expérience visuelle, le plus souvent asymétrique, par privation d’une image et/ou perturbation du lien binoculaire par strabisme et/ou anisométropie, avec ou sans anomalie anatomique de l’œil et/ou des voies visuelles retrouvée. » Dès la naissance, le cerveau apprend à se servir des deux yeux. Mais quand l’un des deux ne fait pas bien son travail, donnant des images de mauvaise qualité, le cerveau va favoriser l’autre œil. L’œil moins performant va être délaissé, devenant de moins en moins efficace au fil du temps. Autrement dit, un enfant souffrant d’amblyopie aura un œil (les amblyopies touchant les deux yeux existent, mais sont très rares) présentant une acuité visuelle plus faible, pouvant même être extrêmement basse dans certains cas. « Parce que l’enfant ne voit bien que d’un œil, il n’est plus capable de voir les reliefs. C’est le principal handicap de l’amblyopie. Par ailleurs, à la différence d’une myopie ou d’un astigmatisme, cet handicap, s’il n’a pas été traité avant l’âge de 6 ans, ne pourra plus être corrigé» alerte le Dr Ludovic N’Kosi, ophtalmologiste, fondateur du Centre ophtalmologique Paris 17e – SOS œil. L’amblyopie, si elle est méconnue, n’est pas rarissime pour autant : 2 à 3% des tout petits seraient touchés, selon une méta-analyse réalisée en 2018.

 

Fonctionnelle ou organique

Il n’y a pas une mais des amblyopies. « L’amblyopie est dite fonctionnelle quand elle due à un trouble réfractif (comme la myopie ou l’hypermétropie) ou à un strabisme. Elle est dite organique lorsqu’elle est secondaire à une pathologie de l’œil, comme la cataracte congénitale, ou une tumeur à la rétine. » Dans tous les cas, si la situation s’éternise, et que rien n’est fait, la perte de vision peut devenir irréversible. Parfois, l’entourage se rendra compte du problème, parce que le tout petit louche, plisse beaucoup les yeux, se couvre un des deux yeux, ou est maladroit (ce qui peut traduire une différence d’acuité visuelle entre les deux yeux)… ce qui les amènera à consulter. Mais très souvent, aucun signe ne viendra les mettre sur la piste d’une amblyopie. Or, ce syndrome se corrige extrêmement bien… à une seule condition : être détecté avant l’âge de 6 ans. Au moindre doute, mieux vaut donc consulter.

Lunettes + cache-œil

« Bien sûr, si le problème à l’origine du défaut d’acuité visuelle est une cataracte, ou une paupière trop basse qui cache la rétine, il faudra avant tout traiter ce problème, souvent avec une opération. » Dans tous les cas, il faudra « rééduquer » l’œil paresseux. Traitée précocement, l’amblyopie se corrige très bien, avec des lunettes ou des lentilles de contact (pour donner une image nette) et un cache-œil, façon petit pirate, sur l’œil performant, pendant quelques semaines, voire quelques mois, pour forcer le cerveau à utiliser les images transmises par le « maillon faible. » Avant l’âge de 4 ans, la récupération est totale dans 95% des cas. Mais attention, avec ce trouble, la partie se termine à 6 ans. Autrement dit, si rien n’a été fait avant, l’œil paresseux ne pourra plus récupérer, et l’acuité visuelle restera figée à un niveau plus ou moins bas. D’où la nécessité de dépistages fréquents et précoces.

Les astrocytes, futur traitement contre l’amblyopie ?

 

Notre cerveau a un don prodigieux : il peut se modifier, s’adapter, créer de nouvelles connexions entre neurones. C’est ce qu’on appelle la plasticité cérébrale. Elle est immense dans les premières années de la vie, bien plus limitée à l’âge adulte. Les astrocytes pourraient changer cela.
Ils sont beaucoup moins connus que les neurones. « Les astrocytes, cellules gliales, qui entourent les neurones, sont pourtant majoritaires dans le cerveau », insiste Nathalie Rouach, chercheuse Inserm. Surtout, ils sont extrêmement utiles. « On a longtemps pensé qu’ils ne servaient qu’à faire le « ménage » dans le cerveau, en détoxifiant le milieu extracellulaire, en apportant les bons nutriments aux neurones… Nous découvrons depuis peu qu’ils sont essentiels à la bonne transmission des informations. » Leur potentiel est énorme. « Nous avons découvert qu’il y avait une très grande différence entre les astrocytes jeunes (ou immatures) des enfants et les astrocytes matures des adultes. Chez l’adulte, le cerveau est très encombré, des sortes de filets envahissent avec l’âge l’espace cérébral, ils figent les systèmes, empêchant les cellules de faire de nouvelles connexions, par manque de place. » Ce n’est pas le cas chez les astrocytes jeunes, ce qui joue un rôle clé dans la plasticité cérébrale. Cela ne veut pas dire qu’il n’y a absolument aucune plasticité chez l’adulte, mais elle est extrêmement réduite par rapport aux premières années de la vie. « Nous avons montré que si nous faisions des greffes d’astrocytes issus d’animaux jeunes (des souriceaux qui avaient entre 1 et 3 jours) dans le cortex visuel d’animaux adultes, nous relancions la plasticité cérébrale. Cela donne l’espoir de pouvoir, au-delà de 6-8 ans, induire à nouveau une grande plasticité dans le système visuel. » Ce qui permettrait aux enfants plus âgés, voire même aux adultes, l’opportunité de guérir leur amblyopie, pour retrouver une meilleure acuité visuelle.

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