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Les cancers de l'œil

Rares et peu connus, les cancers de l’œil doivent être traités par des centres experts délivrant des traitements de pointe. Les spécialistes déplorent un retard de diagnostic qui limite les chances de préserver la vision des patients atteints. Ils ont souhaité sensibiliser le public à l’occasion de la Journée mondiale contre le cancer du 4 février.

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©SCIEPRO

On distingue différents cancers de l’œil dont la cause provient d’une modification des cellules présentes à l’intérieur ou autour de l’œil. Chez l’adulte, le cancer primitif de l’œil le plus répandu est le mélanome de l’uvée, touchant 500 à 600 personnes chaque année en France[1] (le cancer le plus fréquent est la métastase choroidienne qui est une tumeur secondaire). Ensuite viennent les lymphomes, pour lesquels on dénombre 300 nouveaux cas annuels en France[1]. Le rétinoblastome, quant à lui, une tumeur maligne de la rétine, affecte principalement les enfants de moins de trois ans. On compte 1 cas sur 15 000 à 20 000 naissances en France[1] soit environ 50 cas par an[1]. Il existe également des tumeurs secondaires, c’est-à-dire, des métastases oculaires causées le plus souvent par des cancers du rein ou du poumon chez l’homme ou par un cancer du sein chez la femme.

« Il existe vraiment une grande diversité de tumeurs de l’œil et il en existe encore davantage au niveau de la conjonctive, l’enveloppe transparente qui entoure l’œil. Outre leur localisation, il y a un autre point commun à toutes ces tumeurs : elles sont très rares » indique le Docteur Jean-Pierre Caujolle, ophtalmologiste au CHU de Nice.

Les 3 principaux cancers de l’œil :

  • Le mélanome de l’uvée
    Ce cancer se développe dans les mélanocytes de l’uvée, les cellules qui produisent la mélanine, un pigment qui protège contre les rayons UV du soleil. L’uvée est composée de 3 parties : l’iris, le corps ciliaire et la choroïde (cf schéma ci-dessous). Dans 90 % des cas [1], c’est dans cette dernière partie, qui recouvre la rétine, que le cancer se développe.
  • Le lymphome de l’œil
    Il existe différents types de lymphomes affectant l’œil. Certains lymphomes du système nerveux central vont toucher le cerveau, les méninges (l’enveloppe qui entoure le cerveau), la moelle épinière et l’œil. On parle alors de lymphome cérébral ou oculo-cérébral primitif. Lorsque l’œil est le seul organe touché, on parle de lymphome intraoculaire primitif isolé (LIOP) ou de lymphome vitrorétinien primitif (LVRP), selon que les cellules cancéreuses se développent dans la rétine et/ou le vitré (cf schéma ci-dessous). Encore plus rare mais en progression, le lymphome uvéal, qui touche l’uvée.
  • Le rétinoblastome
    Le rétinoblastome est une tumeur de la rétine, causée par la prolifération de cellules immatures. Il affecte le nourrisson et le jeune enfant. 90 % des cas sont diagnostiqués chez les enfants de moins de 3 ans[1]. Le plus souvent, la maladie n’atteint qu’un seul œil (60 % des cas) on parle alors de rétinoblastome unilatéral. Les 40 % des cas restants sont des rétinoblastomes bilatéraux, où les deux yeux sont atteints. 10 % des cas de rétinoblastome sont d’origine génétique.

Les spécialistes mettent en garde

« Depuis quelques années, le dépistage des tumeurs primaires de l’œil se fait plus tardif. On constate avec inquiétude que le pourcentage d’énucléation, c’est-à-dire d’ablation de l’œil, est en augmentation pour certaines tumeurs » déplore le Dr Caujolle. « La faute revient à un manque de moyens humains, car il y a de moins en moins d’ophtalmologistes en France. Espérons qu’avec la délégation de tâches, la tendance s’inversera. » ajoute-t-il.

L’Institut Curie, centre européen de référence pour le traitement du cancer basé à Paris, a décidé d’alerter le public face à cette situation, à l’occasion de la Journée mondiale contre le cancer du 4 février : « Diagnostiquées trop tardivement, ces tumeurs oculaires mettent en jeu le pronostic vital, mais également le pronostic visuel et esthétique de la personne malade » met en garde le Professeur Nathalie Cassoux, cheffe du département d’oncologie chirurgicale et cheffe de service d’oncologie oculaire à l’Institut Curie, dans un communiqué. « Si le patient est pris en charge trop tard et que la tumeur est trop volumineuse, il faut alors procéder directement à une ablation de l’œil. Sans pouvoir proposer de traitement conservateur au patient ».

globe oculaire

Comment dépister un cancer de l’œil ?

Pour le rétinoblastome, touchant principalement les enfants de moins de trois ans, il existe des signaux d’alerte à ne pas négliger. Un strabisme de l’œil peut, par exemple, s’installer précocement et/ou les parents peuvent remarquer l’apparition d’une leucocorie, c’est-à-dire d’un reflet blanc au niveau de la pupille, facilement visible sur les photos prises avec flash.

Concernant les cancers de l’adulte, les signaux sont plus généraux et peuvent survenir à tous les âges : modification de la vision, amputation du champ visuel, inflammation de l’œil, apparition de rougeur dans l’œil révélant une inflammation, douleurs à l’œil, survenue de tâches, d’éclairs lumineux ou de mouches. Cependant ces signes n’apparaissent que longtemps après le début du processus de cancérisation, d’où le retard de diagnostic. De plus, n’étant pas particulièrement évocateurs de pathologies graves, ces premiers symptômes sont le plus souvent considérés comme anodins par les patients qui les ressentent. « Seul un fond d’œil réalisé très tôt peut garantir un bon pronostic » insiste l’Institut Curie.

L’idéal du dépistage : « Pour le mélanome de l’œil, je conseille de réaliser tous les deux ans une rétinographie dilatée, un examen de la rétine (fond d’œil) avec une dilatation de la pupille obtenue grâce à un collyre » indique Jean-Pierre Caujolle. Il s’agit surtout de détecter les grains de beauté suspects dans l’œil, également appelés naevus, qui seront alors surveillés car susceptibles d’évoluer vers un mélanome. « Il est aussi très important qu’en cas de suspicion de cancer, l’ophtalmologiste oriente son patient vers un centre expert, membre du réseau MÉLANOCHAT » précise le Dr Caujolle.

Il existe une prédisposition génétique pour le rétinoblastome. 10 % des cas sont concernés[1]. Dans les familles où la maladie est connue, les enfants sont par ailleurs étroitement surveillés. De même pour le mélanome de l’œil, « il existe des familles particulièrement touchées, mais dans la majorité des cas, il s’agit du hasard » explique Jean-Pierre Caujolle. Le spécialiste rappelle également que le mélanome de l’uvée n’ayant rien à voir avec le mélanome cutané, se protéger du soleil est vivement recommandé pour la peau mais n’a pas le même effet préventif pour les cancers de l’œil. Le lien entre l’exposition au soleil et le mélanome de l’uvée n’ayant jamais été démontré.

Les traitements possibles

Les tumeurs de l’œil ont bénéficié des progrès importants réalisés en cancérologie. Si bien qu’aujourd’hui la vue est, peut être préservée grâce à des traitements conservateurs. Auparavant, le traitement du mélanome choroïdien passait systématiquement par l’ablation de l’œil. Aujourd’hui, il est possible d’éviter l’énucléation, réservée aux tumeurs très massives. Une chirurgie plus ciblée est désormais possible grâce à la protonthérapie, une des formes les plus abouties de la radiothérapie de précision. Cette technique utilise des protons, tandis que la radiothérapie classique utilise des photons. Cela permet d’avoir une action extrêmement précise sur la tumeur, sans endommager les tissus sains à proximité. Ce traitement est efficace dans plus de 95 % des cas d’après l’Institut Curie et présente notamment de très bons résultats pour le mélanome de l’œil.

Pour traiter le rétinoblastome, l’ablation de l’œil touché est encore nécessaire pour 60 % des formes unilatérales, souvent parce que la tumeur est déjà trop étendue au moment du diagnostic. Lorsque l’œil peut être conservé, le traitement repose principalement sur une chimiothérapie, dispensée en intraveineuse ou directement dans l’artère ophtalmique. La chimiothérapie peut-être complétée par des traitements locaux (laser, cryothérapie), visant à préserver la vision de l’enfant autant que possible.

 

[1] Institut Curie.

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